Si Bataille revendique son anti-esthétisme par l’informe auquel peut entre autres mener le sadisme, chez Mirbeau le cheminement est tout autre. Il semblerait même qu’à travers le personnage de Clara, l’informe et le sadisme fassent corps avec un esthétisme affiché, cette fusion formant la flamboyance et la clarté même de son être. Clara exhibe, dans sa luminosité, la beauté du supplice.
Cette opposition n’est pas sans évoquer l’informe chez Nabokov qui tisse aussi un lien entre sadisme et clarté. Cincinnatus, personnage en proie au sadisme dans Invitation au supplice*, représente à plus forte raison l’anti-esthétisme de l’informe qu’il est supplicié par des êtres vulgaires qui ignorent la jouissance de leurs actes (en ce sens, Nabokov irait encore plus loin que Bataille dans sa quête d’anti-idéalisme). Mais au lieu de tirer fierté de la lumière esthétique que pourrait lui conférer sa participation au supplice comme le fait Clara, au lieu de se révéler au travers de l’informe, Cincinnatus se couvre avec hubris de la plus grande opacité, l’opacité même de son corps.
Clara dissimule sa noirceur aux autres pour ne s’y plonger que dans la solitude et arbore sa clarté par son admiration de l’informe...
Kinda Mubaideen
* Vladimir Nabokov, Invitation au supplice, Gallimard, 1960