La nature révèle ses bizarreries et ses caprices et plus encore ses étranges analogies. Ce répertoire inépuisable constitue le corollaire moderne, positiviste des cabinets de curiosité. Il repose sur le postulat suivant : la nature, affirme Haeckel, produit dans son giron une masse inépuisable de formes merveilleuses qui dépassent, par leur beauté et leur variété, tout ce que l’homme peut créer comme formes artistiques*.
Si la publication de cet ouvrage est contemporaine, voire même postérieure à celle du Jardin des supplices, nul doute que Mirbeau, curieux de tout et des plantes en particulier, ait pu s’y intéresser. Mirbeau aura eu également connaissance de l’autre référence du savant, l’Histoire de la création des êtres organisés d’après les lois naturelles (1868).
Le livre n’aborde pas seulement le règne végétal. Le naturaliste se passionne pour les organismes marins inférieurs, parmi lesquels les radiolaires, les éponges calcaires et les méduses**.
On est frappé à quel point certaines formes se réitèrent, s’affirment à travers des organismes issus de mondes distincts. Les planches lithographiques, plus particulièrement les nombreuses feuilles aux lignes blanches sur fond noir, renforcent cette récurrence. C’est le but: ramener l’infinie variété formelle des plantes et des animaux à quelques classes de formes élémentaires***. (EV)
* Cité par Erika Krause, l’Influence de Ernst Haeckel sur l’Art nouveau in l’Âme au corps, Arts et sciences, 1793-1993, catalogue d’exposition, RMN/Gallimard /Electra, 1993, pp.342-351
** Evoquées dans les articles 1, 2, 3, 4.
*** J’emprunte cette phrase à l’article d’Erika Krause.